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L'Iran a retiré ses militaires et diplomates de Syrie deux jours avant la chute le 8 décembre 2024 du président Bachar al-Assad, dont il était l'un des principaux alliés, ont révélé plusieurs sources concordantes à l'AFP.
Téhéran maintenait en Syrie des conseillers militaires issus des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, ainsi que des combattants, et y chapeautait l'action de groupes armés, dont le Hezbollah libanais et des formations irakiennes ou afghanes chiites.
Ces forces ont soutenu le pouvoir d'Assad pendant la guerre civile qui a éclaté en 2011 avec la répression d'un soulèvement prodémocratie et a pris fin avec la prise de Damas par une coalition islamiste.
Un ancien officier syrien, affecté à l'un des quartiers généraux des Gardiens à Damas, a raconté à l'AFP avoir reçu un appel de son supérieur iranien, le 5 décembre, le convoquant au centre d'opérations iranien à Mazzeh dans la banlieue de la capitale le lendemain pour "une affaire importante".
Plusieurs militaires syriens servaient sous les ordres des Gardiens, dont l'influence s'était accrue au fil de l'affaiblissement du pouvoir syrien.
- Débandade -
"A partir d'aujourd'hui, il n'y aura plus de Gardiens de la révolution iraniens en Syrie, nous partons", a annoncé le responsable, un dénommé "hajj Abou Ibrahim", à la vingtaine d'officiers et soldats syriens travaillant pour les Iraniens qui assistaient à cette réunion, selon cet ex-officier qui a requis l'anonymat par crainte pour sa sécurité.
Le responsable iranien a demandé aux militaires syriens de "brûler et détruire les documents sensibles et de retirer tous les disques durs des ordinateurs".
"Tout est fini, nous ne sommes plus responsables de vous à partir d'aujourd'hui", leur a-t-il dit.
L'ex-officier dit avoir été "pris par surprise" par cette annonce, faite en pleine avancée de l'offensive éclair des rebelles lancée le 27 novembre 2024 depuis leur bastion rebelle d'Idleb (nord-ouest).
Comme ses camarades, il a reçu un mois de solde en avance et a attendu chez lui la chute du pouvoir d'Assad, à l'aube du 8 décembre.
La prise de la capitale s'est déroulée sans combats, quelques heures après la fuite du président pour Moscou.
Deux anciens employés syriens du consulat iranien à Damas, qui ont également requis l'anonymat, ont confirmé la débandade.
Selon eux, le consulat a été entièrement vidé le jeudi 5 décembre au soir, et les diplomates sont partis pour Beyrouth par la frontière terrestre.
"Plusieurs employés syriens, qui ont la nationalité iranienne, sont également partis avec de hauts officiers des Gardiens", a ajouté l'un des employés.
Les Iraniens ont demandé aux employés syriens de rester chez eux, et trois mois de salaire leur ont été versés, d'après ces deux témoins.
L'ambassade, le consulat, et toutes les positions militaires iraniennes étaient entièrement désertes le 6 décembre au matin, ont-ils relaté.
Un ancien fonctionnaire du poste-frontière de Jdaidet Yabous avec le Liban, s'exprimant également sous couvert d'anonymat, a décrit un embouteillage monstre à la frontière les 5 et 6 décembre.
- Evacuation via une base russe -
Le colonel Mohammad Dibo, de la nouvelle armée syrienne, raconte qu'après la prise d'Alep, principale ville du nord de la Syrie, par les rebelles le 29 novembre, "l'Iran n'a plus combattu" leur offensive.
Les Iraniens "ont été forcés de se retirer de façon subite après l'effondrement rapide" des forces d'Assad, précise-t-il à l'AFP dans une base militaire au sud d'Alep, qui était l'un des principaux quartiers généraux iraniens.
"Lorsque nous sommes entrés dans leurs bases" à Alep, "nous avons trouvé des passeports et des papiers d'identité que des officiers iraniens n'avaient pas eu le temps d'emporter", ajoute le colonel Dibo.
Sur le mur de la base abandonnée, un journaliste de l'AFP a vu des slogans iraniens et du Hezbollah.
Le colonel qui a participé à l'offensive rebelle affirme qu'après la chute d'Alep "près de 4.000 militaires iraniens ont été évacués via la base russe de Hmeimin" où ils s'étaient réfugiés, d'autres fuyant par la route vers l'Irak ou le Liban.
Selon l'ancien officier syrien qui a requis l'anonymat, le 5 décembre, un haut responsable militaire iranien, connu sous le nom de hajj Jawad, a été évacué de la région de Hama (centre) vers la base de Hmeimin, d'où il a pris l'avion pour Téhéran.
Les forces sous commandement iranien étaient notamment concentrées dans des positions sensibles à Damas et sa banlieue, surtout autour du sanctuaire chiite de Sayyida Zeinab et de l'aéroport.
C.Dean--TFWP